Vendredi 14 novembre 2025, l’Assemblée nationale a adopté à 158 voix contre 49 le « statut du bailleur privé », une mesure phare du projet de loi de finances pour 2026. L’objectif est de relancer l’investissement dans le parc locatif privé tout en garantissant des loyers abordables, face à la crise du logement qui frappe de nombreuses villes françaises. Ce dispositif combine avantages fiscaux attractifs et conditions strictes pour encadrer la location et favoriser la rénovation énergétique.
Sur le plan fiscal
Au cœur du dispositif, l’amortissement fiscal permet aux propriétaires de déduire chaque année une partie de la valeur de leur bien, réduisant leurs revenus fonciers imposables. Pour un logement neuf, le taux varie selon le niveau de loyer : 3,5 % pour un logement intermédiaire, 4,5 % pour un logement social, et 5,5 % pour un logement très social. Pour l’ancien rénové, les taux sont légèrement inférieurs mais restent incitatifs pour les bailleurs respectant les critères énergétiques et de loyers. L’avantage fiscal est plafonné : il ne peut dépasser 80 % de la valeur du bien et 8 000 € par an pour un maximum de deux logements.
En complément, les propriétaires qui pratiquent des loyers volontairement inférieurs au marché peuvent bénéficier de bonus supplémentaires : le taux d’amortissement peut augmenter de 0,5 à 1,5 % selon le type de loyer (intermédiaire, social, très social). Les petits bailleurs relevant du micro-foncier pourraient également profiter d’un abattement allant jusqu’à 65 % pour les loyers très sociaux. Par ailleurs, le dispositif prévoit la possibilité d’imputer un déficit foncier jusqu’à 40 000 € par an, des exonérations d’IFI et une exonération de plus-value après 20 ans de détention.
Conditions à respecter
Pour bénéficier du statut, les bailleurs doivent respecter plusieurs critères. Les loyers doivent rester dans les limites conventionnées, assurant ainsi un accès abordable au logement. La location à des membres de sa famille est interdite afin d’éviter les montages fiscaux artificiels. Les propriétaires doivent également s’engager à louer leur bien au moins six ans, garantissant une certaine stabilité locative. Enfin, le logement doit respecter des exigences énergétiques : dans le neuf, la norme RE 2020 s’applique, tandis que l’ancien rénové doit atteindre un DPE A ou B après travaux.
Les enjeux et objectifs du statut
Ce dispositif prétend répondre à plusieurs objectifs, mais son efficacité reste contestable. Il vise à relancer l’investissement locatif privé pour augmenter l’offre de logements abordables, mais le risque de spéculation reste élevé et l’impact sur les loyers accessibles est incertain. Il encourage la rénovation énergétique, mais les coûts pour les propriétaires peuvent être prohibitifs et limiter l’attractivité du dispositif. La stabilisation fiscale des bailleurs, en remplaçant des dispositifs temporaires comme Pinel par un cadre “durable”, peut sembler rassurante, mais elle ne garantit pas que tous les investisseurs bénéficieront réellement d’un cadre prévisible et avantageux. Enfin, la promotion de la détention à long terme via des amortissements étalés et des exonérations fiscales peut profiter davantage aux propriétaires aisés qu’à l’objectif réel de logements abordables.
Limites et critiques
Malgré ses avantages, le statut ne fait pas l’unanimité. Le plafond de 8 000 €/an pour deux logements maximum pourrait être jugé trop faible pour séduire certains petits investisseurs. Les contraintes liées aux durées d’engagement, aux plafonds de loyers et aux exigences énergétiques peuvent freiner certains bailleurs potentiels. Enfin, le succès de ce dispositif dépendra fortement de la rigueur des contrôles administratifs, pour éviter les abus ou le non-respect des engagements.
Conclusion
Le statut du bailleur privé, adopté le 14 novembre 2025, se veut une réponse ambitieuse à la crise du logement, mais son efficacité reste loin d’être garantie. Malgré un amortissement fiscal présenté comme attractif et un encadrement strict des loyers censé favoriser l’accès au logement, le dispositif apparaît complexe et contraignant pour les propriétaires. Quant aux incitations environnementales, elles reposent sur des normes élevées qui pourraient décourager une partie des bailleurs. Au final, le succès de cette réforme dépendra surtout de la capacité de l’administration à en assurer le suivi et de l’adhésion réelle des investisseurs — deux conditions qui, à ce stade, restent très incertaines.





